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UN SOUFFLE CHARISMATIQUE SUR LE SYNODE

La première partie du Synode s’est clôturée le dimanche 29 octobre par la messe. On retiendra principalement, les « gros titres flash des journaux ». On a cherché, en vain semble-t-il, dans quelle orientation s’est engagée cette assemblée de 363 délégués, en grande partie composée d’évêques – car il s’agissait d’un synode des évêques – auxquels se sont joints des « invités » du pontife : 70 participants laïcs dont 35 femmes. Tous les participants avaient un droit de vote égal mais cette égalité de vote n’a pas une très grande importance. Le vote n’approuve pas une décision juridique, mais uniquement des échanges verbaux qui ont eu lieu pendant ces quatre semaines.

              Cependant, à lire le document final, on sent, plus que l’on ne constate, des orientations sous-jacentes d’un certain nombre de chrétiens revendicatifs, ou mal à l’aise mais cela est difficile à affirmer. Car ce vote ne comportait aucune obligation d’acceptation et bon nombre de participants savaient en votant affirmativement des propositions, que celles-ci demandent nécessairement à être davantage discutées. Et comme ce vote affirmatif n’était pas un acquiescement du contenu on comprend mieux pourquoi, sur près de 1 200 propositions d’amendements, un grand nombre ait difficilement obtenu le pourcentage requis des 2/3 de votes.

              La deuxième caractéristique de ce synode est d’avoir éliminé l’importance des journalistes et leur supposée influence sur les membres du synode. Malgré un rapide « briefing » donné, Monsieur Paolo Ruffini, Préfet du Dicastère de la Communication, une discrétion absolue était demandée aux participants. Elle fut assez bien respectée. Les journalistes sont retournés chez-eux. Certains membres du synode ont trouvé que c’était une bonne chose. Mais cette protection médiatique a eu pour effet de ne pas faire parler de synode ou presque. Aujourd’hui, le silence continue, nous faisant oublier qu’il y a eu un synode. Ce n’était pas un moyen très astucieux pour rejoindre le peuple de Dieu.

              Le troisième élément qui caractérise ce synode est la place de la spiritualité du « Renouveau charismatique » : le lien spirituel donné par l’Esprit où les façons de prier s’inspirent d’un certain pentecôtisme catholique, qui dans un silence psychologique permettait d’écouter « l’Esprit visiteur ». Cette liturgie de la prière s’est développée avec vigueur dans les années 1970 par tout l’Occident. Puis, peu à peu, en France, elle s’est presque éteinte d’elle-même. Elle a donc retrouvé une nouvelle naissance au synode. Quel effet cela a-t-il eu sur les évêques ? Nous n’en savons rien. Mais on ne peut pas s’empêcher de voir que les rares communiqués qui nous viennent de cette réunion sont emprunts de cette émotion collective et de l’amitié des rencontres. Cette présence « pentecôtiste » de l’Esprit Saint risque d’atténuer la doctrine sur la nature de l’Église. Le fondateur de l’Église est le Christ – non pas la première, ni la troisième personne de la Sainte Trinité – et le mettre en parenthèses introduit une certaine « théologie » ou « spiritualité » de l’Église qui est fausse. L’Esprit devient alors l’unique mandataire de l’autorité ecclésiale. (Or, il n’y a aucune action individuelle, d’une seule des trois personnes divines en dehors de la Trinité. Il n’y a pas d’action de l’Esprit Saint sans le Père et le Fils en même temps[1]). On peut encore avoir besoin d’un pape, mais on n’a besoin ni d’un évêque, ni d’un curé, comme autorité. L’Esprit nous suffit.

L’Église catholique n’est pas uniquement un rassemblement charismatique. Elle n’est pas seulement une « communion » spirituelle – ce que voulait et prêchait Luther – elle est aussi une « société » possédant ses finalités propres, ses lois et son gouvernement qui font autorité. Elle a été fondée sur Pierre et les apôtres qui ont reçu l’onction au jour de la Pentecôte. « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église » (Mt 16,18).  Et cela ne peut pas être changé par une quelconque autorité humaine ! L’Esprit Saint n’est pas un oiseau migrateur qui, lorsqu’on l’appelle les yeux fermés, vient se poser sur l’épaule de celui qui crie et lui siffler dans l’oreille la formule charismatique qu’il attend !

              L’Église, société, est aussi le « Corps mystique » du Christ et ce Corps a une « Tête », non seulement invisible, mais « visible ». Et surtout, l’Église a un fondateur qui n’est pas l’Esprit Saint, mais le Verbe incarné, le Christ[2]. Le Pape ne succède pas au Christ mais le représente et dans l’histoire de l’Eglise, le Pape a eu beaucoup de successeurs, lesquels ont toujours la même mission : sanctifier, enseigner et gouverner l’Eglise… Ces missions ne sont pas propres au Pape mais sont aussi à la charge des évêques dans leur propre diocèse. Cependant, le Pape peut appeler les évêques pour agir collégialement avec toute la hiérarchie. C’est un moment solennel dans l’exercice de l’autorité.

Le document de la fin de cette session

          Le document final sera validé par le pape à la fin du synode, en octobre 2024. Celui qui nous a été donné est un document de synthèse des divers amendements suggérés par une lecture rapide. Que comporte-t-il ?

              Si on lit attentivement, on se rend compte que le projet qu’il contient discrètement – très discrètement – est de créer, à l’intérieur de l’Église, des communautés charismatiques de fidèles qui se réunissent, pour prier ensemble, recevoir l’effusion de l’Esprit et « discerner ce que l’Esprit dit aux Églises »[3]. « Il est opportun de valoriser la pluralité des formes et des styles, des méthodes et des critères que l’Esprit Saint a suggérée au fil des siècles et qui font partie du patrimoine de l’Église »[4].

              Que doivent faire ces communautés ? Valoriser toutes les formes de prière communautaire, sans se limiter à la seule célébration de la Messe. Ces communautés doivent, ensemble, s’occuper d’agir dans tous les domaines du fait social et religieux : rendre le langage liturgique plus accessible et plus incarné dans la diversité des cultures, s’occuper spécialement des pauvres, discerner les politiques et s’occuper du Bien Commun, créer une solidarité sociale. Ces communautés qui se constituent sous l’effusion de l’Esprit Saint doivent permettre de régler les conflits, calmer les tensions, aider à résoudre les problèmes internes des familles, etc. Et surtout ces communautés sont les lieux les plus efficaces pour exercer un véritable « discernement » sur les autorités cléricales, principalement les curés et surtout les évêques et de surcroît, sur les candidats au sacerdoce et aussi sur la nomination des évêques ! Donc, pour mettre fin à ce que le document appelle le cléricalisme. Cela empêcherait, pense-t-on, que le pasteur ne soit laissé à sa solitude. De plus, cette démarche favoriserait aussi que dans le diocèse, s’établisse entre les diverses communautés qui s’y trouvent, un lien charismatique, et que chacun agisse sous la motion de l’Esprit Saint. Autrement dit, nous n’avons plus besoin de prêtres, ni d’évêques. Ces communautés doivent découvrir en elles-mêmes, comment remplir la mission de l’Église. Des questions se posent : est-ce possible seulement avec l’aide des motions de l’Esprit Saint ? Est-ce que nous n’allons pas vers la destruction du gouvernement épiscopal ? C’est ce que visait la réforme Luthérienne.

              En fait, ces « communautés » existent déjà, ce sont les paroisses ! Et à leur tête, il y a une autorité : le curé, aidé de ses vicaires. Et dans ces paroisses, il y a des groupes qu’autrefois on appelait des mouvements apostoliques ou des associations pieuses qui accueillent des chrétiens agissant ensemble, pour des fins spirituelles et de charité déterminées. Ce sont les associations privées ou publiques. Privées : l’Église reconnaît la validité catholique des statuts et la liberté d’organisation de ses membres – Publiques : elles dépendent de l’autorité de l’Église et l’engage (Cn 301§3). Elles sont distinctes des instituts de vie consacrée et des Sociétés de vie apostolique dont les finalités sont nettement spirituelles (Cn 298).

              Toutes ces associations participent à la vie apostolique de l’Église, même si leurs membres sont en grande partie des laïcs, ce qui n’interdit pas d’y trouver aussi des prêtres. C’est ce qui détermine la structure visible de l’Église et distingue en elle les deux fonctions de ses membres : les clercs – du diacre à l’évêque – qui agissent en vertu de leur pouvoir d’Ordre sous la nomination d’une juridiction et les laïcs qui appartiennent à des communautés religieuses (surtout féminines) où leurs actions sont ordonnées par une Règle ou d’autres qui sont dans des associations spirituelles comme les confréries de toutes sortes : Saint Rosaire, Sainte Anne, Adoration perpétuelle, etc. Il y a également un grand nombre de laïcs qui n’appartiennent à aucun mouvement, mais qui sont baptisés, peut-être aussi confirmés et qui œuvrent chrétiennement et au nom de leur foi. Ce sont des membres de l’Église de plein droit. Et non des chrétiens de troisième rang.

Un pentecôtisme catholique ?

              Lorsque l’on parle des « souhaits » dans le document du Synode, on a l’impression de se trouver devant une réalité d’Église catholique où à peine sortie des « débats conciliaires », elle accueillit paternellement l’apparition du néo-pentecôtiste. Vers 1970 naissaient alors des cercles charismatiques. Ils vont se trouver un peu dans toutes les Églises. Couplés avec le New Age, et avec la fin du Concile Vatican II (ouvert le 11 octobre 1962 par le pape Jean XXIII terminé le 8 décembre 1965 sous le pontificat de Paul VI), ces mouvements vont diffuser de nouvelles formes de piété spirituelle. Ainsi, les changements opérés par le Concile vont se croiser avec cette apparition que l’on a appelée le  « renouveau charismatique ». On pourrait dire d’une certaine manière que l’on recherchait la présence de l’Esprit Saint de manière émotive. On le voit à certains signes, tels la glossolalie  (le parler en langues), les nombreuses guérisons plus ou moins permanentes et surtout, ce qui sera retenu : un souci d’ouverture et d’accueil de la culture locale qui s’insinue dans la liturgie avec, par exemple l’apparition d’orchestres pop-louanges ou des danses africaines ou encore les servantes d’assemblées… Il en est résulté une sorte de bouleversement dans la piété des fidèles et, en même temps, une certaine « chaleur » d’amitié avec les membres du sacerdoce ministériel. Ce mouvement est entré dans les Églises protestantes et catholiques, au printemps 1966, sous l’influence de deux membres laïcs de la faculté de l’Université Duquesne[5], les Docteurs William Storey et Ralph Keller qui cherchaient comment ils pourraient être remplis des dons de l’Esprit Saint. On leur répondit qu’il fallait recevoir le « baptême du Saint-Esprit ». Quatre participants résolurent de tenter l’expérience où deux d’entre eux ont demandé qu’on leur impose les mains[6]. Ce fut le premier groupe. Ici, on pourrait faire remarquer que l’Église catholique avait, depuis longtemps, un sacrement, qui sans compléter le baptême, le confirme. C’est le sacrement de la confirmation. Il donne « une effusion spéciale de l’Esprit Saint, comme elle fut accordée jadis aux apôtres au jour de la Pentecôte. La confirmation apporte une croissance et un approfondissement du baptême et nous enracine plus profondément dans la filiation divine qui nous fait dire, « Abba » Père (Rm 8,15). Elle nous unit plus fermement au Christ et augmente en nous les dons de l’Esprit Saint. Enfin, elle rend notre lien avec l’Église plus parfait ».[7]

Ne s’est-on pas laissé séduire par ce que l’on a appelé le Renouveau charismatique, les charismes et ce que l’on nomme les dons du St Esprit ?  Ne fallait-il pas veiller à une meilleure formation avec une plus grande pédagogie et une foi mieux formée afin de recevoir ce que l’Église apporte depuis sa fondation ? Mais à cette époque, on donnait le sacrement de confirmation sans trop expliquer ce qu’il porte en lui de l’action de la grâce.

              Mais revenons à notre histoire. De ces premiers groupes furent formés des groupes de prières néo-pentecôtistes sur un campus catholique. De là, la formule se répandit à l’Université Notre-Dame (Indiana) et partout ailleurs. L’onction fut appelée : « Baptême dans le Saint-Esprit ». Il centre la personne sur le renouvellement de l’engagement individuel à la personne de Jésus-Christ. Beaucoup se sentirent renouvelés. Ils ont « senti » une présence personnelle de Jésus-Christ nouvelle, profonde et ont l’impression de le connaître entièrement. Cette caractéristique du renouveau charismatique a conduit les papes Paul VI et Jean Paul II à encourager activement les fidèles et le clergé à s’impliquer dans ce courant. Paul VI a invité le Renouveau à tenir sa conférence annuelle à Rome. Au cours de celle-ci, en 1975, il a affirmé: «Rien n’est plus nécessaire à ce monde de plus en plus sécularisé qu’un témoignage de «renouveau spirituel» comme nous le voyons évoqué par le Saint-Esprit dans diverses régions et milieux… Comment alors ce renouveau spirituel ne serait-il pas une «chance» pour l’Église et le monde ?  Et comment, dans ce cas, chacun ne devrait-il pas employer tous les moyens nécessaires pour qu’il en demeure ainsi.» Jean-Paul II a suivi les traces de Paul VI en rencontrant des groupes de charismatiques auxquels il a exprimé à une occasion ce qui suit :  « Demeurez dans une attitude de constante et reconnaissante disponibilité à chaque don que l’Esprit souhaite déverser dans vos cœurs.» Encouragés par ce leadership, les évêques ont écrit des lettres pastorales soutenant et encourageant le Renouveau. Mais attention, les dons surnaturels et ordinaires sont des dons non pour les individus mais au service de la communauté, pour édifier le peuple de Dieu. (1Co,12)

            En France, la diffusion fut intense et belle comme un éclair. En 1971, se tient, à l’initiative de l’Union de Prières de Charmes (Ardèche), la première convention pentecôtiste internationale : deux catholiques y ont retrouvé deux cents protestants évangéliques. La même année, à Brest, de retour des États-Unis, Xavier et Brigitte Le Pichon, deux scientifiques, fondent un groupe de prières, ce qui est fait aussi, à Fourvière par le jésuite américain Mike, attirant à lui ses deux confrères, Laurent Fabre et Bertrand Lepesant, les futurs fondateurs du Chemin neuf (1973) et du Puits-de-Jacob (1977). En 1972, le film – Jesus Revolution- sort aux États-Unis et permet à Jean Duchesne de révéler au public français la large palette de dons, de bienfaits de ce courant qui insiste sur la conversion personnelle et qui permet de se situer parfois en réaction à un christianisme perçu comme trop cérébral. Parmi les Français qui reçoivent l’effusion de l’Esprit, se trouvent Martine Laffitte et Pierre Goursat, les fondateurs de la communauté de l’Emmanuel. Avec elle, les nouveaux mouvements s’enchaînent : L’Arche de Lanza del Vasto, la Théophanie, fondée par le  moine orthodoxe, Jacques Langhart, sur la paroisse Saint-Esprit ; le Lion de Juda (Les Béatitudes), communauté fondée à Montpellier par Gérard Croissant (Ephraïm), ancien protestant où avec Philippe Madre, catholique, tous deux ordonnés diacres, seront réduits à l’état laïc face aux scandales d’emprise psychologique,  financiers et sexuels qui seront dénoncés et jugés.  

              Les anciennes communautés ne sont pas épargnées par ce courant. A l’exemple du couvent dominicain, où en 1976, alors réuni en chapitre général, les jeunes Pères, séduits par le Renouveau et qui refusent la nouvelle orientation de la congrégation, vont obtenir de se disperser. L’un d’eux, André Gouzes, se retire à l’abbaye de Sylvanès (Aveyron) dont il fait un haut lieu de réflexion et de formation liturgique. Quatre autres frères vont fonder à Aix, en 1977, les Frères de Saint-Jean de Malte. Entre 1976 et 1978 naissent Siloë, Tibériade, La Source, Le Rocher, Sichem, Le Chêne de Mambré, Réjouis-toi… L’Emmanuel devient la principale des communautés pluri vocationnelles dont l’essor a été aussi fulgurant qu’est discrète la personne de son fondateur. L’accent de ces communautés est mis sur « l’adoration et la compassion » par lesquelles se fera l’évangélisation de l’homme d’aujourd’hui. Le culte du Sacré-Coeur est ranimé, dès 1975, à Paray-le-Monial. Le sanctuaire sera confié à l’Emmanuel en 1986. Mais différent est le charisme de Pascal et Annick Pingault, ces anciens de Mai 68, en recherche d’un art de vivre qui touchait la masse des gens simples. Certains des premiers compagnons du Pain de Vie (Évreux, 1976) sont issus de familles « anarchistes depuis trois générations ». Tous ont été marqués par le témoignage des Actes des Apôtres et non par l’Église qu’ils ne connaissaient pas et vis-à-vis de laquelle ils ne nourrissaient aucun ressentiment.

Cependant, l’éblouissement du 1er collège apostolique – les apôtres – c’est dans l’Eglise qu’il se perpétue et non dans les mouvements. Car cette Eglise, qui se réjouie d’avoir reçu l’Esprit Saint, garde avant tout le souci de former l’intelligence à la certitude de la Foi.

              Bien sûr, la ferveur spirituelle provoquée par ces mouvements charismatiques a été un élément important de leur rayonnement. Mais tout mouvement de ferveur se calme et s’atténue. Et s’il est le soutient principal de l’œuvre, cela entraine la chute de la nouveauté. C’est ce qui s’est passé pour la majeure partie des mouvements issus du Renouveau. Mais il y eut pire ! Et le pire n’est pas dans les scandales qui ont fait jour et qui ont ébranlé la « couronne » de gloire qu’on avait plantée sur la tête des initiateurs. Le pire est un véritable manque, presqu’un désert, d’une réelle formation de la vérité de la foi. La fidélité de la foi ne tient en rien aux battements du cœur, lesquels peuvent-être très forts et en même temps très faux, pleins de satisfactions inconscientes de motivations personnelles. Chacun peut avoir son oiseau migrateur sur l’épaule et le prendre pour l’Esprit Saint. Seule l’autorité de l’Eglise qui s’exerce par l’Évêque, peut dire d’une façon claire, ce qui vient de Dieu et qui engage la personne dans son apostolat et ce qui vient de l’engagement de toute l’Église dans la proclamation d’une vérité de foi. Le reste est une inspiration personnelle qui peut être une grâce réelle, laquelle est toujours accompagnée d’une vraie vérité conforme à ce qu’enseigne l’Eglise. Cela n’a rien à voir aux sifflements de l’oiseau migrateur auquel on attribue la force divine de l’Esprit Saint. La foi de l’Eglise doit toujours être pour chaque chrétien le soc inébranlable que  le Christ nous a « appris » (mandavi vobis) et avec laquelle « il demeure avec nous jusqu’à la consommation des siècles (Mt 28, 20) ».

Qu’est-ce qu’il en reste ?

              Alors qu’intimement et discrètement, on pensait que ce mouvement charismatique d’une rare effervescence et d’une spiritualité séduisante, allait remplacer la vie religieuse consacrée et ses vieilles habitudes, on assiste à un effet inverse. Malgré une pauvreté de vocations, les « vieilles » communautés religieuses sont toujours vivantes, sans pour autant avoir une flambée de vocations. Et la plus grande partie des communautés du Renouveau s’éteignent peu à peu. Celles qui existent ont eu un sérieux besoin de l’aide de l’Église pour se maintenir, d’ailleurs leurs nouveautés flamboyantes ne peuvent réellement exister et tenir dans le temps en dehors de l’Eglise !

              Devons-nous nous interroger ? Que s’est-il passé ? Il faut réfléchir un bon moment avant de trouver la ou les réponses.

              Certes, il fallait rompre avec le rigorisme intégriste qui séduisait après la Révolution Française, rigorisme dont on ne savait pas bien s’il devait aider l’Église ou sauver une forme élitiste de la société française. Elle avait ses traditions, ses coutumes, ses valeurs et ses degrés relationnels. Sur ce point, ces communautés nouvelles ont, en raison même de leur existence, accompli un véritable balayage. On n’allait plus à l’Église parce qu’on devait tenir un rang dans une société bourgeoise que la Révolution avait mis à l’avant-garde. On y allait, parce qu’on aimait Jésus-Christ, qu’on avait appris à servir son Église par l’action catholique et parce qu’on cherchait une union personnelle avec Lui et ses dons. Sans trop s’en rendre compte, on était passé, d’un intégrisme social à un intégrisme personnel. D’une spiritualité légaliste, on était passé à une spiritualité personnaliste. L’une et l’autre ont été un échec. Et pourquoi ? Parce que l’on n’avait pas compris qu’être baptisé et confirmé n’est pas d’abord un droit qui nous est accordé de recevoir des gratitudes et des caresses de la part de Dieu. Être baptisé et confirmé c’est découvrir et accepter une « mission », celle d’agir, guidé par l’Esprit, au salut du monde, de tous ceux qui ne connaissent pas Dieu et de leur donner le Seigneur dans le mystère de son Incarnation, de sa Rédemption et de sa Résurrection. Ce n’est pas une affaire de spiritualité. C’est une mission qui s’attache implicitement au baptême et à la confirmation. Et pour accomplir cette mission, il ne faut pas uniquement la sensibilité du cœur, il faut la lumière de la vérité dans l’intelligence. Et, hélas, cette lumière exige une vraie formation, dont les fondements sont dans une bonne philosophie et une théologie adéquate. On peut clamer la joie de la Foi ! On doit s’attacher à la connaître.

              Que l’on ait pris à la fin de ce synode un temps fou à examiner 1 200 amendements pose question. Qui les a posés ? Cela venait-il des participants informés de la Vérité et de la Tradition de l’Église ? Et soucieux de rejoindre la Vérité du Fondateur ? Ou de l’Oiseau migrateur posé sur l’épaule du « priant » que l’on assimile à son Esprit Saint ? Il faudrait peut-être éviter de transformer le Synode en volière où s’ébattront les différents mandataires des oiseaux individuels, tous porteurs des « mandements de l’Esprit Saint ».

              Aline Lizotte


[1] Cf article : https://asso-srp.org/leglise-est-elle-invitee-a-changer-son-systeme-de-gouvernement/

[2] Il faut remarquer le peu de place que tient Jésus-Christ, dans le rapport du Synode.

[3] Intégralité du rapport du Synode, 2c

[4] Pape François, discours d’introduction du synode, 5 Octobre 2015

[5] Pittsburgh, aux États-Unis. Fondée par des membres de la congrégation des Spiritains, 

[6] L’imposition des mains est l’un des signes sacramentels du sacrement de l’ordre et du sacrement de la confirmation et il ne peut être imposé autrement.

[7] Cf Catéchisme de l’Église catholique, nos 1285-1321